Mobilisation contre la loi de programmation de la recherche

À l’instar du Conseil National des Universités (sections 1, 2 et 3 et groupe 1), de la conférence des doyens, des départements et sections des facultés de droit ainsi que des prises de position collectives et individuelles des enseignants-chercheurs, le Ceprisca manifeste ses réserves vis-à-vis du projet de loi de programmation de la recherche adopté par la Commission mixte paritaire lundi 9 novembre, tant au regard des méthodes employées que sur le contenu de la réforme. Ses dispositions, votées pour certaines en catimini, mettent en péril le statut de fonctionnaire, la qualité des recrutements des enseignants-chercheurs et par là-même celle des enseignements dispensés à nos étudiants qui seront les premiers touchés par les inégalités entre universités auxquelles ce projet va conduire.

Le Ceprisca exprime son adhésion et son soutien aux décisions adoptées par les motions des sections 1, 2 et 3 ainsi que celle du groupe 1 du CNU.

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Département de droit privé,
UFR de droit et science politique d’Amiens
Résolution du 16 novembre 2020


Le département de droit privé de l’UFR de droit et science politique de l’Université de Picardie Jules Verne, réuni en assemblée générale,

  • Partage les vives inquiétudes exprimées notamment par les voix de sa composante lundi 16 novembre et de la représentation de ses membres au Conseil National des Universités (section 01) le 12 novembre dernier, au sujet de la loi de programmation de la recherche (LPR), en l’état actuel de son élaboration, à l’issue de la commission mixte paritaire (CMP) qui a eu lieu le 9 novembre dernier,
  • Affirme à son tour son attachement indéfectible à un service public national de l’enseignement supérieur et de la recherche et au contrôle des carrières d’enseignant-chercheur en son sein par une instance nationale composée de membres élus par leurs pairs,
  • Soutient les actions individuelles en faveur du CNU et contre la LPR portées par des enseignants-chercheurs qui se mobilisent pour l’Université, ses valeurs et son indépendance, notamment les décisions, éventuellement prises par ses membres, de suspension immédiate et pour une durée illimitée des fonctions non essentiellement pédagogiques,
  • Appelle les candidats aux postes de direction de l’université à se prononcer sur la LPR et en particulier son article 3bis.

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Lettre de l’UFR de droit et de science politique d’Amiens

Les enseignants-chercheurs de l’UFR de droit et science politique de l’Université de Picardie Jules Verne tiennent à signifier, par la présente lettre, les vives inquiétudes de notre communauté universitaire au sujet de la loi de programmation de la recherche (LPR), en l’état actuel de son
élaboration, à l’issue de la commission mixte paritaire (CMP) qui a eu lieu le 9 novembre dernier.

Quatre dispositions sont, en l’état, inacceptables, comme l’ont rappelé par communiqué les sections 01, 02, 03 et 04 du Conseil National des Universités (CNU), ainsi que le Groupe 1 du CNU :

  1. La disposition relative à « l’amendement pénal », qui, en l’état, menace tout mouvement de contestation dans les universités, qu’il émane des personnels et/ou des étudiants et condamne donc en leur sein la liberté d’expression.
  2. La disparition de toute qualification des professeurs par une instance nationale en dehors du concours d’agrégation qui implique qu’ils ne pourront plus être nommés qu’à l’issue de ce concours ou alors uniquement selon une voie nouvelle purement locale. Si les juristes, les gestionnaires et les politistes sont particulièrement attachés au concours d’agrégation, les autres voies de recrutement nécessitant une qualification nationale avaient leur utilité, notamment en raison de la suppression du « second concours d’agrégation ». À toutes fins utiles, nous vous rappelons que l’agrégation du supérieur ne se tient, dans chaque discipline, que tous les deux ans, à partir d’un vivier de postes contingenté.
  3. Plus généralement, un ensemble de réformes ponctuelles, parfois déclarées « expérimentales », visant à passer outre une qualification nationale des enseignants-chercheurs ; s’il apparaît que le CNU doive être réformé en profondeur, l’ensemble de notre communauté universitaire demeure attaché à une qualification nationale, gage d’homogénéité et d’excellence de la recherche française. La possibilité de faire entrer dans la carrière des collègues qui n’auront pas été qualifiés nationalement constitue selon nous un risque fort de disparités et d’hétérogénéité des formations et de la recherche, à rebours de leur qualité, sachant que l’ensemble du territoire national doit pouvoir profiter de celles-ci.
  4. La volonté d’accroitre le recrutement des enseignants chercheurs par voie contractuelle au détriment des postes statutaires, notamment illustrée par la création d’un « CDI de mission » qui permet de recruter un enseignant-chercheur le temps d’un projet, remet en cause, en favorisant l’instabilité et la précarité, la qualité des enseignements dispensés aux étudiants.

Enfin, et plus généralement, concernant la méthode employée, nous regrettons vivement que cette discussion essentielle sur l’avenir de la recherche française, affirmant et réaffirmant la qualité de cette recherche et le principe des libertés académiques, n’ait pas mis en œuvre ledit principe qu’elle se promet de faire respecter. Des amendements nouveaux et importants sont apparus au Sénat (alors qu’ils ne figuraient ni dans le projet initial ni dans le texte soumis à l’Assemblée nationale) et ont été votés de nuit, dans la situation sanitaire que nous connaissons. Si nous sommes conscients de l’importance de réformer nos institutions afin de nous saisir des moyens de toujours faire progresser notre recherche et notre enseignement, il apparaît que les libertés académiques – qui n’est pas une vaine locution mais le signe de ce que les universitaires sont les mieux placés pour savoir ce qui est bon pour l’université – sont, par la méthode utilisée, bafouées.

Centre de droit privé et de sciences criminelles d'Amiens – UR UPJV 3911